Chers confrères
Chers amis,
Suite à un contrôle national des Caisses d’Assurance Maladie, un certain nombre de nos confrères et amis ont été mis en difficulté pour méconnaissance des règles de facturation et certains ont dû rembourser des indus.
Il nous apparait important de rappeler les règles et de vous mettre en garde par rapport aux dérives que nous constatons. La très grande majorité d’entre elles étant en lien avec une non connaissance des règles de facturation et d’autres beaucoup plus rares sont manifestement des actes malhonnêtes qui pourraient conduire à des sanctions disciplinaires et pénales.
La Sécurité Sociale avec ses 3 branches (Famille, Retraite, Maladie) a été créée en 1947. La première convention nationale entre les syndicats médicaux et les Caisses Nationales d’Assurance Maladie a été signée le 28 Octobre 1971, elle pose alors les bases du paiement à l’acte et de l’exercice libéral médical.
Un an plus tard la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (NGAP) est mise en place mais il faudra attendre 2004 pour affirmer que les seuls actes remboursables doivent être inscrits à la NGPA et surtout dans la Classification Commune des Actes Médicaux (CCAM) qui comporte plus de 7 500 codes différents et 19 chapitres qui segmentent l’anatomie et non les spécialités.
La CCAM en pratique
Chaque prestation médicale est ainsi qualifiée par un code alphanumérique (4 lettres et 3 chiffres) :
- la première lettre désigne l’appareil anatomique : J pour appareil urinaire
- la deuxième lettre désigne l’organe : A pour le rein, B pour le bassinet, C pour l’uretère, D pour la vessie, E pour le col vésicale, G pour la prostate, H pour le testicule, …
- la troisième lettre pour le type d’intervention : ablation-fragmentation G , pose d’une prothèse L, changement de prothèse K, exérèse-résection F, bilan, drainage D, plastie M, ponction-biopsie H, diagnostic ou imagerie Q, suture simple C, …
- la quatrième lettre indique le mode d’accès : abord direct A, endoscopie E, coeliosocopie C, voie ouverte, ponction J, biopsie C, trans-cutané F, trans-cutané echo-guidée J,
Exemple :
- JCGE00 : J Appareil Urinaire, C uretère, G ablation destruction, par endoscopie E,
- JAFC00 : J appareil urinaire, A rein, F ablation (néphrectomie) par coelioscopie
Il faut rajouter les lettres clefs qui modifient les tarifs :
- J : majoration transitoire de chirurgie pour les actes thérapeutiques sanglants non répétitifs réalisés en équipe sur un plateau technique lourd : + 6,5 %
- K : majoration avec J pour S1 ou OPTAM CO, ou SII pour patient CSS (CMU-C, ACS) ou URGENCE : +20%
- T : majoration avec J pour SII avec OPTAM (SANS CO) : +11,5%.
- et les lettres d’urgences : O (8-20H) : 80 €, U (20h-8HOO) : 50 €, S (actes sous anesthésie minuit-8h00) : 80 €, F(dimanche, jour férié) : 40 €.
Les codes O,U,P,S et F sont exclusifs les uns des autres. Ils ne peuvent être facturés qu’une seule fois par intervenant et par patient quelque soit le nombre d’actes qu’il réalise.
On ne peut pas donner les codes CCAM aux complémentaires santé car cela lève le secret médical, on peut tout au plus donner la catégorie d’acte car le niveau de remboursement est souvent différent :
- ADE : Acte D’Echographie
- ADC : Acte De Chirurgie
- ADO : Acte D’Obstétrique
- ADA : Acte D’Anesthésie
- ATM : Acte de Technique Médical
Définition de l’acte Global
Les accords signés entre l’Assurance Maladie et les Syndicats Médicaux représentatifs considèrent que chaque libellé d’un acte comprend l’ensemble des gestes nécessaires à sa réalisation dans le même temps d’intervention conformément aux données acquises de la science et au descriptif de l’acte dans la liste.
L’acte global est :
- soit un acte qui peut être réalisé de manière indépendante : ex : sondage vésical JDJD001 / décaillotage de vessie JDJE001/ JDQE001 : endoscopie vésicale.
- soit une procédure qui regroupe habituellement et de façon pertinente plusieurs actes isolés.
Exemple : résection de prostate JGFA015 (on ne peut pas rajouter endoscopie vésicale JDQE001, décaillotage JDJE001, sondage JDJD001)
On peut rajouter des actes que s’ils sont autorisés par la classification : voir rubrique associations :
On peut retrouver les actes compris dans l’acte global en début de chapitre en cliquant sur la lettre.
Ainsi on découvre en tête de chapitre de l’appareil urinaire que : tout acte de coelioscopie ou de laparotomie comprend inclus dans le tarif : le lavage, le drainage, l’évacuation de collection et la pose de redon.
Impossible donc de les facturer lors d’une coelioscopie.
De même dans le chapitre 8,2,2 pour les voies urinaires supérieures : la pose de la sonde double J est compris dans l’acte global d’urétéroscopie !!
Le contrôle radiologique compris dans le tarif est l’usage de la scopie mais par contre l’injection de produit de contraste est possible en sus avec réalisation de clichés.
Dans le chapitre 8.2.2.7 : ablation du calcul du rein : le tarif est le même que le calcul soit fragmenté ou non, qu’il y ait ou non une dilatation de l’uretère.
Rappelons ici que le tarif CCAM, pour un acte chirurgical non répétitif, comprend la période post-interventionnelle pendant 15 jours après, avec ou sans hospitalisation, pour un suivi Hors complications (en cas de complication on peut facturer à nouveau des gestes) pour les conséquences directes de cet acte.
En cas de seconde intervention rendue nécessaire par une modification de l’état du patient ou pour une pathologie intercurrente, cela ouvre droit à une nouvelle période de 15 jours.
Pour les anesthésistes, le tarif couvre la visite pré-interventionnelle et la surveillance post-interventionnelle pendant 15 jours pour un suivi hors complications et en ce qui concerne les conséquences directes liées à l’acte.
L’association d’acte
L’association d’acte correspond à la réalisation de plusieurs actes dans le même temps, pour le même patient, par le même médecin dans la mesure où il n’existe pas d’incompatibilité entre ces actes.
L’association de deux actes au plus est autorisée sauf exception (100% +75% +/-50% : actes sur membres différents, lésions traumatiques multiples et récentes, chirurgie carcinologique ORL). L’acte dont le tarif est le plus élevé est tarifé à taux plein, le second est tarifé à 50% de sa valeur.
Chirurgie à 4 mains
Lorsque les conditions de prise en charge prévoient que l’acte peut être réalisé par plusieurs médecins alors l’intervention de chaque médecin est décrite par un code d’activité distincte :
Code 1 : l’intervenant est seul ou il est le premier
Code 2, 3 : pour les intervenants suivants
Code 4 : pour les actes nécessitant une anesthésie générale ou loco-régionale
Code 5 : surveillance d’une CEC
Si les codes d’activités (2-3-4-5) n’apparaissent pas dans le menu déroulant vous ne pouvez pas les coder donc les facturer.
Lorsque les conditions de prise en charge ne prévoient pas la présence de plusieurs médecins, l’acte ne peut être codé et facturé qu’une seul fois même si plusieurs médecins participent à sa réalisation.
Dans le cadre du contrôle qui touche plusieurs dizaines d’urologues sur le territoire, nous faisons de cette question un point de désaccord syndical et nous demandons, comme en sécurité aéronautique, que la possibilité d’opérer à plusieurs soit enfin reconnue et prise en charge.
Remarque : le code phase de traitement permet d’identifier les étapes successives au sein d’un même acte médical lorsque ces derniers sont décalés dans le temps.
Lorsque qu’une procédure opératoire est un acte global, il n’est pas autorisé de la fragmenter en actes isolés facturés par des médecins différents.
Le statut Conventionnel pour les Professionnels de Santé :
Il est indispensable à préciser car le tarif est différent selon si vous êtes, Secteur I, Secteur II, OPTAM, ….
La nécessité et la place d’un compte-rendu opératoire
L’article I-5 de la CCAM précise que pour pouvoir être honorés les actes techniques réalisés doivent être tracés dans un compte-rendu écrit et détaillé qui doit permettre la continuité des soins.
La première partie du compte-rendu opératoire comporte des informations administratives : nom, prénom, date de naissance du patient, nom et prénom de l’opérateur et de son aide opératoire, nom et prénom de l’anesthésiste, voir de l’IADE.
La deuxième partie est un résumé médical du dossier précisant les antécédents notables utiles, l’indication et la justification de l’acte, plus ou moins associés à de l’iconographie.
La troisième partie reprend chronologiquement les étapes de l’intervention en commençant par le type d’anesthésie (générale ou loco-régionale), la stérilité des urines si besoin, l’état cutané, la préparation cutanée et du champ opératoire, la réalisation d’une antibioprophylaxie avant l’incision, éventuellement doublée en cas de poids supérieur à 100 kg ou d’IMC > 35 kg/M2 ou chirurgie de plus de 4h00. La réalisation de la check-list.
L’installation est détaillée (assis, décubitus, proclive…), en particulier au niveau des points d’appuis, de la pose des garrots, des sondes (urinaire, gastrique), des mesures de protection…
Puis l’intervention est détaillée, notamment concernant les variantes anatomiques, les difficultés opératoires, …
La chronologie et la durée de l’intervention sont notées dans le compte-rendu.
Il faut, en fin de compte-rendu, éventuellement évoquer les suites attendues et les prescriptions post-opératoires (antibiotiques, drainages, anticoagulation, rééducation, …) éventuellement conjointement avec l’anesthésiste.
Il est impératif de faire apparaître le compte des compresses dont la responsabilité relève exclusivement de l’opérateur (à notre grand regret) et le compte des aiguilles. L’infirmière de salle qui participe au compte est, selon la Jurisprudence, une préposée occasionnelle du chirurgien considéré comme commettant et donc le responsable. N’oubliez pas que c’est le chirurgien qui demande le nombre de compresses à l’infirmière de salle et pas l’inverse.
Si un médecin traitant du patient vient assister à l’intervention, son nom doit être impérativement marqué sur le compte-rendu pour lui permettre d’être honoré par l’Assurance Maladie (K10 ou K15 + indemnités kilométriques). Il doit normalement signer ce compte-rendu.
Le compte-rendu fait partie des documents qui doivent obligatoirement être intégrés au dossier de l’établissement pour permettre le versement du GHS.
Il doit être envoyé au médecin traitant du patient, aux correspondants et au patient lui-même.
En conclusion, c’est un temps important pour la qualité des soins, la traçabilité de ce qui est fait et la continuité des soins.
Toute falsification volontaire d’un compte-rendu opératoire pour permettre une valorisation du tarif CCAM peut entrainer une condamnation disciplinaire ou pénale entrainant une interdiction temporaire ou définitive d’exercice.
Par exemple la réalisation d’un curage ganglionnaire, d’une résection du col, de la prostate ou de la vessie non confirmé ensuite par un examen anatomopathologie de la pièce opératoire est une pratique décrite mais formellement interdite considérée comme faux, usage de faux, fraude contre la sécurité sociale avec pour conséquence remboursement d’indus, y compris GHS si le GHS a été majoré, pénalité financière, amende, déconventionnement, interdiction d’exercer voire peine de prison, …
Les sites d’aides au codage et des PMSI
Ces sites ne sont absolument pas officiels. Ils ne sont pas reconnus par l’Assurance Maladie. Il ne faut donc pas les suivre aveuglement. Quand aux programmes des services d’établissement du PMSI, ils ne sont pas parfaits et ils peuvent autoriser des associations interdites. Seul le médecin reste responsable de sa facturation et il est censé connaître la NGAP et la CCAM.
Conclusion
Nous n’avons jamais été formé au codage et aux règles conventionnelles qui pourtant organisent notre quotidien de médecins libéraux. Néanmoins pour l’assurance maladie et les tribunaux nous sommes censés les connaître et les respecter.
Nous espérons que cet article vous permettra d’y voir plus clair et de rectifier les erreurs de cotations réalisées aujourd’hui de bonne foi.
Quand à ceux d’entre nous, qui sont heureusement minoritaires, qui falsifient leurs compte-rendus opératoires, nous leur rappelons nos obligations déontologiques de probité et nous les encourageons à changer rapidement de pratiques car ils jettent l’opprobre sur toute notre profession en prenant en plus un risque professionnel et pénal d’interdiction d’exercice et d’emprisonnement.
Au niveau syndical nous demandons la reconnaissance des chirurgies à 4 mains et la possibilité de facturer le deuxième et le troisième geste sans appliquer la règle des 100 % pour le premier geste, 50% pour le deuxième et gratuité pour le troisième.
Nous continuerons à vous accompagner au quotidien et nous vous remercions de votre soutien.
Vous pouvez diffuser ce document et demander aux collègues d’adhérer au syndicat directement sur le site : SNCUF.FR
Bien amicalement,
Didier Legeais
Président du SNCUF
Actu générales Le 15 janvier 2024